N° 148 - Automne 2025

Aux origines des androïdes

Archétype de la science-fiction, le robot humanoïde devient une réalité. Alors que L’essor de l’intelligence artificielle suscite la crainte de voir la machine remplacer
les humains, l’arrivée des androïdes dans notre quotidien doit-elle nous alerter ?

Dans son livre L’Ève future, publié en 1886, Villiers de L’Isle-Adam sauve du désespoir un jeune lord fou amoureux d’une femme, qu’il juge pourtant superficielle. Un argument d’une rare élégance, que l’auteur résout en remplaçant la malheureuse éconduite par Hadaly, une androïde que Villiers de L’Isle-Adam fait inventer par Thomas Edison, le savant star de l’époque. La suite de l’histoire mon- trera la vanité de cette entreprise. Même parfaite et douée d’une forme de conscience, une créature artificielle ne saurait se substituer à un être de chair et de sang.
Première occurrence de ce qu’on appellera plus tard la science-fiction, le roman, complexe, interroge aussi bien la place de Dieu face aux méfaits des progrès scientifiques, que celle de l’amour et de la nature humaine dans cette fin du XIXe siècle frappée de dépression. Parmi ces questions qui résonnent encore aujourd’hui, celle qui aborde la problématique de l’androïde apparaît visionnaire. La grande peur d’alors n’est pas que le robot soit perçu comme capable d’anéantir l’humanité pour lui prendre le pouvoir – ce qui servira de ressort dramatique à toute la science-fiction du XXe siècle –, mais qu’il se substitue à l’humain, que ce soit dans le cadre du sentiment amoureux ou, aujourd’hui, dans celui du travail.

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(Tesla)
Optimus 2, l’androïde que Tesla commercialise. L’entreprise d’Elon Musk ne tiendra pas sa promesse d’en produire 5000 exemplaires en 2025.

Une crainte désormais alimentée par le feu roulant de l’intelligence artificielle – sorte de robot, mais sans enveloppe physique – vue par certains comme une réelle menace existentielle. Alors, ima- ginez la panique, lorsque les androïdes se généraliseront! S’ils se généralisent, les premiers modèles domestiques commercialisés par Tesla et Unitree fleurant bon l’effet d’annonce.
Comme pour l’IA, les discours sur les robots se veulent néanmoins constructifs. Pas d’armées de robots à l’horizon envahissant les usines et les bureaux, mais plutôt une association entre l’homme et une machine que personne n’imagine, même dans un avenir lointain, dotée d’intelligence émotionnelle. On voit d’ailleurs l’industrie orienter son utilisation plutôt vers les soins où l’androïde peut apporter son aide, d’autant plus dans ce secteur frappé par le manque de personnel. Interviewée dans ce dossier, l’ingénieure en robotique Aude Billard, croit, elle aussi, à une technologie suppléante, mais pas remplaçante. En rappelant ce pré- cepte simple : « Un robot n’est pas un autre être, il ne faut pas oublier que c’est nous qui l’avons créé. Et qu’il est programmé pour faire ce qu’on lui demande. »

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