N° 138 - Été

Le côté obscur du métavers

C’est un monde nouveau qui s’explore sans se déplacer. Le métavers projette la société dans son double virtuel fantasmé, plus beau et plus libre. Mais comme toutes les découvertes, cette dernière n’est pas sans danger.

À quoi servent ces métavers qui monopolisent en ce moment les conversations ? Bonne question. Encore faut-il savoir de quoi on parle avant d’y répondre. Un métavers, c’est un monde virtuel rêvé dans lequel tout est possible, plus léger, plus beau et plus agréable à vivre. Un univers où chacun peut devenir un autre, caché sous le déguisement de son avatar, son double numérique. Une version cool de la réalité qui existe déjà dans les jeux vidéo depuis plus de dix ans, mais que découvrent Facebook, Microsoft et Apple. Et dont ils ont vite saisi le fort potentiel de retour sur investissement.

À l’heure où le temps perdu à visionner des microvidéos sur Instagram et sur TikTok nous culpabilise et que l’abus de réseaux sociaux s’avère désastreux, le métavers interroge. À quoi sert-il ? Qu’y faire exactement ? N’est-il pas la dernière invention d’un capitalisme vorace qui transforme l’ennui en milliards de dollars ? Sa fortune dépendra des activités qu’il propose. Mais aussi du comportement de ceux qui en profiteront.

12,3 millions de joueurs de Fortnite ont assisté au concert virtuel du rappeur Travis Scott en 2020.
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(DR)
12,3 millions de joueurs de Fortnite ont assisté au concert virtuel du rappeur Travis Scott en 2020.

Des attitudes problématiques sont déjà signalées. Dissimulés derrière l’anonymat de leurs avatars, certains utilisateurs agressent, harcèlent, dénigrent. Ce sont les mêmes « trolls » qui alimentent les commentaires haineux que Facebook a tant de mal à modérer. Ce qui ne laisse augurer rien de très bon sur le plan du vivre-ensemble dans cet univers, quand bien même il est virtuel.

L’entreprise américaine assure qu’elle travaille sur ce problème qui engage la popularité, et donc le succès, de son réseau social en version alternative. Une police des bonnes manières dont chacun sera l’agent et le dénonciateur ? Voilà ce qui, pour certains, s’assimile à de la censure, à une forme de privation de liberté. Sans liberté, le métavers risque d’être une coquille vide dont le seul désir assouvi sera celui de la consommation. La nature humaine est ainsi faite : en voulant fuir la complexité du monde réel, elle crée son clone encore plus contraignant. Triste virtualité.

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