N° 140 - Printemps 2023

Homo detritus

Au Congo, des artistes confectionnent des costumes fantastiques à partir de nos déchets. Le photographe français Stéphan Gladieu a réuni dans un livre ces panoplies inspirées des tenues traditionnelles et qui symbolisent, aussi, l’échec de nos sociétés polluantes.

L’homme pneu.
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(© Stéphan Gladieu)
Junior Longa Longa Mosengo, dit « Savant Noir », L’homme pneu, quartier de Matonge Kimpwanza à Kinshasa, 2020.

Un homme-tong, une femme-aluminium… Et encore d’autres, recouverts de tubes de dentifrice usagés qui les font ressembler aux créatures des films de science-fiction américains des années 50.

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(© Stéphan Gladieu)
Junior Longa Longa Mosengo, dit « Savant Noir », Masala. L’homme plume, quartier de Matonge Kimpwanza à Kinshasa, 2020.
Babouche.
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(©Stéphan Gladieu)
Patrick Kitete Bwanakitoko, Babouche, quartier de Kimbangu à Kinshasa, 2020.

Ou aux monstres du cinéma japonais plein d’insectes géants menaçant de détruire la terre. Et pourtant. Les personnages pris en photo dans les rues de Kinshasa par le Français Sté-phan Gladieu ne viennent pas d’une autre planète.

Boîte de conserve.
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(©Stéphan Gladieu)
Junior Mvunzi Muteba Nzonkatu, Boîte de conserve, quartier de Yolo Nord à Kinshasa, 2020.
Poisson et tomate.
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(©Stéphan Gladieu)
Arnold Nginbi Etabe, Poisson et tomate, quartier de Kalamu à Kinshasa, 2020.

Ou plutôt si, de celle où finissent nos déchets occidentaux sous lesquels étouffent certains pays d’Afrique. Pour le collectif « Ndaku ya la vie est belle » basé au Congo, cette invasion polluante n’est pas forcément une fatalité.

L’homme rasoir.
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(©Stéphan Gladieu)
Bowandundu Musafiri Master, dit « Chaka », L’homme rasoir, quartier de Selembao à Kinshasa, 2020.

Entouré de 25 artistes, son fondateur, Eddy Ekete, transmue ces déchets en costumes fantastiques. Regroupées par genre (les paquets de cigarettes, les pneus), par matière (le plastique, le métal, les plumes) ou par couleur, ces panoplies attestent d’une tradition ancestrale pour la parure de cérémonie. Sauf qu’ici, les dieux invoqués sont ceux de l’écologie pour que cesse le massacre.

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(©Stéphan Gladieu)
Jules Disoluka Sarkozi, L’homme gobelet, quartier de Matonge Kimpwanza à Kinshasa, 2020.

Sorti aux Éditions Actes Sud sous le titre Homo detritus, ces images spectaculaires sont accompagnées d’un texte du romancier Wilfried N’Sondé. Face à elles, le lecteur est pris d’un sentiment étrange : trouver belles ces tenues extraordinaires qui ne sont en fait que les reflets d’une triste réalité.

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